Alice Guy | biographie

Alice Guy

Réalisatrice et productrice

Aller-retours entre le Chili et l'Europe

Je suis dans le ventre de ma mère, Marie Clotilde Franceline Aubert, quand je fais mon premier grand voyage qui me mène du Chili à Saint-Mandé où je nais le 1er juillet 1873. Mon père, Émile Guy, propriétaire d’une chaîne de librairies au Chili, mon frère et mes sœurs sont restés au Chili où ma mère retourne dès ma naissance. Peut-être que mon père n'était pas mon père.

Je passe mes toutes premières années chez ma grand-mère maternelle en Suisse avant que ma mère ne vienne me chercher et que nous embarquions pour un retour au Chili. J'y découvre mon père, mon frère, mes sœurs, mais aussi une nouvelle langue, une nouvelle vie.
Puis, je reviens en France pour entrer dans une pension religieuse comme mes sœurs aînées. Après la faillite et la mort de mon père, la mort de mon frère, je m'installe à Paris avec ma mère pour m'occuper d'elle. J'entreprends alors une formation de dactylo-sténographe, métier nouveau à l'époque.

Mon entrée chez Gaumont

A l'âge de 21 ans, j'entre au Comptoir général de la photographie comme secrétaire de Léon Gaumont. Je me souviens bien du jour où je me suis présentée pour le poste : Léon Gaumont « Vous êtes bien jeune, Mademoiselle », ce à quoi j'ai répondu : « C'est une maladie qui passera très vite, Monsieur ». C'est peut-être cet à-propos qui aurait convaincu Gaumont de m'embaucher.
Quelques mois plus tard, Léon Gaumont rachète le Comptoir en difficulté et me garde comme secrétaire.
A cette époque, les chercheurs et inventeurs ne cessent de rivaliser d'imagination pour mettre au point un appareil opérationnel de prises de vues et de projection d'images animées. « J'entendais du matin au soir, parler de cinéma. Cependant les films que l'on projetait n'étaient que des expériences de laboratoire ; toujours des sorties d'usine, trains en marche, défilés de troupe. Il me semblait qu'on pouvait faire autre chose... Je demandai à M. Gaumont de m'autoriser à écrire et à faire jouer par mes camarades une ou deux saynètes... La permission me fut accordée à condition que cela n'empiète pas sur mon travail de secrétaire... A côté des ateliers de travaux photographiques, à Belleville, se trouvait un petit jardin... C'est là que je mis en scène mon premier film La Fée aux choux ».
Nous sommes en 1896, je deviens la première femme cinéaste au monde.

La plupart des spécialistes semblent s'accorder aujourd'hui pour dire que La Fée aux choux a aussi été le premier film de fiction réalisé.

Je prends alors la direction des productions cinématographiques, secteur nouvellement créé par Gaumont, et j'en suis jusqu'à 1905 la principale réalisatrice.
Ce sont des centaines de films que je réalise dans tous les genres possibles, satires, comédies, aventures, drames sociaux…
En 1906, je réalise La vie du Christ, long métrage de plus d'une demie heure et superproduction avec 300 figurants, 25 tableaux, et des décors en extérieurs.
Passionnée également par les films parlants, les phonoscènes, possibles grâce au chronophone, couple de machines développées par Georges Demeny, j'en réalise et produit des centaines entre 1902 et 1906.
En 1905, c'est moi qui fait entrer Louis Feuillade chez Gaumont en tant que scénariste et assistant.

Mes années américaines

En 1907, j'épouse Herbert Blaché, un opérateur d'origine anglaise, sous-directeur de la succursale Gaumont à Berlin, que j'ai rencontré à Berlin quelques mois plus tôt. Cette même année, Gaumont envoie mon mari à Cleveland pour vendre son chronophone et bien sûr je l'accompagne. Je nomme alors à ma place Louis Feuillade comme directeur artistique. Après plusieurs mois infructueux, nous nous installons à Flushing, près de New-York, et en 1910, je fonde ma propre maison de production, la Solax Film Co. Le 21 octobre sort le premier film A child's sacrifice (le sacrifice d'une enfant). Ma société a réalisé et produit environ 600 films. Je dirige également une compagnie d'acteurs La Solax Stock.

Je tourne des comédies, des mélodrames, des westerns, des films de guerre, des films historiques, des films fantastiques, des films sociaux... des courts et des longs métrages. Je connais le succès et la notoriété, pas une semaine sans une interview.

La migration des grands studios vers la Californie, les dettes contractées par mon mari et ses infidélités entraînent la vente des studios de Fort Lee et notre séparation. Je décide de rentrer en France avec mes deux enfants âgés de 14 et 10 ans.

Retour en France

Je ne retravaillerai jamais dans le cinéma malgré mes tentatives, les pionniers étant tombés dans l'oubli et mon œuvre américaine ignorée en France. Je cherche alors à reconstruire ma filmographie, écris des contes pour enfants et mes mémoires.
Je décède le 24 mars 1968 à Wayne, New-Jersey, devenue amnésique, ne me souvenant plus d'avoir fait du cinéma.
La reconnaissance de ma qualité de première femme cinéaste fut longue et celle de mes œuvres loin d'être achevées.

Mes oeuvres

J'ai travaillé sur des centaines de films mais beaucoup ont été perdus.

Réalisatrice en France

1896
La fée aux choux
1897
Le pêcheur dans le torrent
Baignade dans un torrent
Bob Walter - Drame serpentine
1898
L'aveugle fin de siècle
Chez le magnétiseur
Les cambrioleurs
Scène d'escamotage
Surprise d'une maison au petit jour
1899
Au cabaret
La bonne absinthe
1900
Avenue de l'Opéra
Chapellerie et charcuteries automatiques
Chez le photographe
Danse de saisons - L'hiver, danse de la neige
La concierge
Chirurgie fin de siècle
Les fredaines de Pierrette
Au bal de Flore
1902
Lina Esbrard - Danse serpentine
Sage-femme de première classe
Intervention malencontreuse
Miss Dundee et ses chiens savants
1903
Comment Monsieur prend son bain
Faust et Mesphistophélès
1905
Les O'Mers dans Les Maçons
La statue
La charité du prestidigitateur
Clown, chien et ballon
Le coq dressé
Cake-Walk nègre
Espagne
Tango et la Malagueña y el torero
Saharet - Le boléro
Alice Guy tourne une phonoscène
Polin - l'anatomie du conscrit
Dranem - Le vrai Jiu-Jitsu et Five o'clock tea
Felix Mayol - Questions indiscrètes
Félix Mayol - La polka des trottins
Félix Mayol - Lilas-blanc
1906
La naissance, la vie et la mort du Christ
Une course d'obstacles
Madame a des envies
Une femme collante
La hiérarchie dans l'amour
La marâtre
Une histoire roulante
Le matelas épileptique
Le Noël de monsieur le curé
La vérité sur l'homme-singe
Les résultats du féminisme
Effets de mer
Le fils du garde-chasse
1907
La course à la saucisse
Le billet de banque
La glu
Le bonnet à poil
Le frotteur
Une héroïne de quatre ans
Le lit à roulette
Le piano irrésistible
Le ballon dirigeable « La Patrie »
Sur la barricade

Réalisatrice aux États-Unis

de 1910 à 1920

A child'sacrifice
Across the Mexican Line
Greater Love Hath no Man
For the Love of the Flag
Falling Leaves
A Man is a Man
A Fool and His Money
Fra Diavolo
Mignon
Algie, the miner
Making of an American Citizen
Dick Whittington and his cat
The pit and the pendulum
Matrimony's speed limit
The lure
Michel strogoff
Ocean Waif
The Empress
The great aventure
The divorcee
Tarnished reputation (dernier film)